Gestion des RH en période de confinement : constats et enseignements pour demain

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La pandémie du Covid-19 et le confinement qui s’en est suivi a obligé toutes les entreprises et leurs salariés à modifier leur organisation de travail en quelques heures. Plus ou moins préparée, cette expérience collective aura probablement des impacts sur notre gestion des RH, nos modes de travail et de collaboration futurs. Alors que les enquêtes d’impacts sur les entreprises et leurs collaborateurs se multiplient sur internet,  faisons le point sur ce qui pourrait influencer nos organisations de demain.

Début avril, on comptait plus d’un travailleur sur 2 en chômage partiel, 1 sur 5 en télétravail, les autres étant soit en congés, en arrêt maladie ou garde d’enfant. Pour préserver la santé de leurs collaborateurs et répondre à l’obligation de confinement, les entreprises ont revu leur organisation de travail selon plusieurs critères :

> La nécessité de maintenir les activités indispensables « au bon fonctionnement de la nation » avec comme corollaire la mise en place de nouvelles règles de santé et de sécurité au travail,
> La possibilité (ou non) de mettre en place le télétravail  selon la nature de l’activité, la disponibilité des équipements et les connaissances techniques des collaborateurs,
> La priorisation des activités « jugées » essentielles et/ou vitales pour l’entreprise et ses clients.

Toutes ces décisions ont été prises « brusquement », dans l’urgence.

Organisation du travail pendant le confinement : quelques constats

La mise en conformité des conditions de travail a été progressive du fait d’informations données au compte-goutte et souvent de la pénurie des moyens humains et/ou matériels.

Concernant le télétravail, il serait plus approprié de parler de travail à distance en situation de crise sanitaire. Les conditions sont bien différentes d’un télétravail organisé et négocié. En effet, aujourd’hui le travail à distance est :

> subi (et non sur la base du volontariat),
> quotidien, et non en alternance avec des temps sur le lieu collectif de travail,
> souvent pour toute l’équipe, et non selon un roulement négocié entre collègues,
> en présence de son conjoint.e, ses enfants, ses parents…et non dans des conditions de concentration équivalente ou supérieure au lieu de travail habituel.

De plus, pour les entreprises n’ayant pas mis en place cette modalité de travail au préalable (environ  2/3 des salariés), managers et salariés n’ont pas été formés.

Enfin, s’agissant de la priorisation des activités au sein des structures, elle a parfois pu être ressentie comme injustifiée, entrainant des questionnements du type « Pourquoi suis-je en chômage partiel et pas mon collègue ? Pourquoi n’ai-je pas été consulté alors que j’estime avoir du travail ? ».

De multiples sources de conflits nées du confinement

Si la situation actuelle a clairement révélé les capacités de créativité, d’innovation et d’engagement des équipes elle a aussi provoqué ou renforcé un sentiment d’incompréhension et d’injustice.  Associé au climat anxiogène lié à la pandémie, des tensions sont nées. Selon les retours des entreprises, elles sont fréquemment liées à :

> Un manque d’information et de compréhension des décisions prises,
> Un sentiment d’iniquité de traitement, d’injustice (trop d’activité ou pas assez, concertation de certains et pas d’autres, accompagnement managérial différencié…),
> Des discordes existantes et non résolues avant l’entrée en confinement.

Le contexte général engendre des questionnements sur le sens du travail et ses conditions d’exercice : « quelle est ma valeur ajoutée si ma mission n’est pas considérée comme « vitale » pour mon organisation ? », « Pourquoi je passe autant de temps sur les routes ou en réunion, ce n’est pas ça mon métier ! ». Nous constatons que la période que nous vivons fragilise les individus (dont certains se déclarent en détresse psychologique), mais elle fragilise aussi les collectifs de travail.

Reprise d’activité : renforcer le dialogue avec les équipes

Lors de la reprise progressive des activités, certaines de ces difficultés vont perdurer et pourront être accentuées par des conditions de travail hétérogènes : maintien en télétravail, en chômage partiel, distanciation physique et sociale, rotation des équipes, diminution forte des échanges informels….

Si aujourd’hui nous ne savons pas comment sera le « monde de demain », ce que nous savons c’est que cette expérience de confinement interroge nos manières de travailler ensemble (management, processus et dialogue autour du travail).

Afin de préserver l’engagement des collaborateurs et de reconstruire la performance globale de nos organisations, il apparaît nécessaire, même en situation d’ « urgence économique », de prendre le temps, oui, prendre le temps de discuter aux différents niveaux de l’entreprise.

Tout d’abord, pour expliquer en toute transparence ce que l’on sait, ce que l’on ne sait pas ainsi que les décisions prises mais aussi pour rassurer et donner le cap.

Mettre en place dès maintenant des espaces de discussion sur le travail, individuels et/ou collectifs, partager les retours d’expérience positifs et négatifs aideront chaque structure à se poser les bonnes questions pour « remettre en route » une organisation la plus sereine possible. Devant toutes ces interrogations (justifiées ou non), chaque structure devra apporter des réponses qui seront d’autant plus pertinentes qu’elles auront été co-construites avec les collaborateurs.

Et si nous commencions par ces deux questions « simples » : que nous apprend cette période de confinement sur notre manière de travailler ensemble ? Et comment « rénover » notre organisation de travail pour être plus fort face aux défis à venir ?